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Escursioni a Berlino Vista dal Drachenberg
Silvia Schaub

Par Silvia Schaub

Les chaussures de marche, j’aurais pu m’en passer quand, de la station du S-Bahn Heerstrasse, à l’ouest de la ville en direction de Grunewald, j’ai emprunté les chemins sinueux qui montent au Teufelsberg. Et je n’ai pas vraiment transpiré non plus, bien qu’il s’agisse de la deuxième plus haute montagne de Berlin. Elle a même été la première pendant longtemps, jusqu’à ce que les Arkenberge la détrônent. Culminant à 120,1 mètres d’altitude, on parlerait plutôt de colline à l’échelle suisse. Mais les montagnes de Berlin offrent ce qui manque souvent aux villes plates: de la hauteur et du dégagement.

Si j’ai délaissé pour une fois les incontournables de Berlin que sont la porte de Brandebourg, l’Île aux musées et l’église du Souvenir, c’est à cause du guide pratique de randonnée que m’a offert une amie berlinoise avec un clin d’oeil, et pour me remercier de l’avoir guidée dans les montagnes suisses. Intitulé «Bergführer Berlin», ce «guide pour les alpinistes urbains» a été corédigé par Wilfried Griebel. Pour lui, il est évident que lorsqu’on aime la randonnée, il faut s’intéresser à Berlin. «Les montagnes sont par nature immuables. Mais à Berlin, on ne sait jamais si elles seront encore là la prochaine fois qu’on viendra ou si de nouvelles seront apparues, dit le psychologue munichois en riant. Et puis, dans une ville aussi animée et riche en attractions, on a parfois aussi besoin de se détendre.»

Une montagne de gravats

Contrairement aux Alpes, de nombreuses montagnes berlinoises n’ont pas été formées par la géologie, mais par la main de l’homme. C’est le cas du Teufelsberg, au sommet duquel je me tiens. Certaines personnes le surnomment «monument de la défaite», car il a été construit sur les ruines de Berlin après la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit d’un tas de 26 millions de mètres cubes de gravats, sur lequel on a planté près d’un million d’arbres. Le Teufelsberg est ainsi devenu une zone de détente de proximité, avec piste de ski (une course de coupe du monde a même été organisée ici en 1985!), piste de luge, tremplin de saut à ski et piste de cyclo-cross.

Mais les Britanniques et les Américains n’ont pas tardé à voir les avantages de ce promontoire et ont bâti une station d’écoute à son sommet pendant la guerre froide. Ses cinq coupoles iconiques ressemblent aujourd’hui plutôt à des ballons de foot géants et usés. Il y a énormément d’histoires à raconter sur «l’Oreille», nous révèle Jean-Baptiste Schöneberger. Architecte au service de la recherche historique, il connaît chaque recoin de ce site qui est ouvert aux visites guidées depuis 2011. Dans les années 1880, on projetait d’y construire des villas pour la haute société; en 1916, d’y organiser des Jeux olympiques; plus tard, l’architecte de Hitler, Albert Speer, commença à y bâtir un technicum pour la «capitale mondiale Germania ». Rien de tout cela n’a été réalisé. Aujourd’hui, l’histoire n’est pas la seule chose qui attire les gens sur le Teufelsberg. Ce monument de béton presque sans fenêtres a été découvert par les artistes, qui en ont fait la plus grande galerie de graffitis d’Europe.

Escursione a Berlino Eichwerder Steg
Silvia Schaub
La rivière Tegeler Fliess est l’un des plus beaux paysages naturels de Berlin.

Une véritable montagne de moraines...

Tandis que je continue ma randonnée jusqu’au sommet voisin du Drachenberg par un sentier bien balisé, je tombe à mi-chemin sur un rocher nu arborant une croix sommitale: je n’en crois pas mes yeux, car ce rocher est entièrement artificiel. Il permet aux membres du club alpin allemand de s’entraîner à la grimpe sur 60 voies différentes. Le sommet du Drachenberg, quant à lui, offre une vue imprenable sur la ville, les tours de la radio et de la télévision, le stade olympique et l’immeuble du Corbusier.

D’ici, il est vrai qu’on a l’impression que Berlin n’est constituée que de montagnes. Certains quartiers en portent d’ailleurs le nom, comme Prenzlauer Berg. Et Kreuzberg, bien sûr: cette colline du 66 mètres de haut forme géologiquement la frontière sud de la vallée proglaciaire de Berlin. Sa première mention date de 1290, et il s’agit d’une véritable montagne de moraines. Kreuzberg abrite le parc Victoria, au milieu duquel coule l’unique ruisseau de montagne de Berlin, avec une cascade artificielle de calcaire et de granit. Le parc a été construit en 1888 en mémoire de Victoria, épouse de l’empereur Frédéric III et fille de la légendaire reine Victoria. La cascade a été rajoutée quelques années plus tard pour donner au lieu l’allure d’un paysage de montagne.

... et une croix au sommet

La nouvelle montagne de Hahneberg, à Spandau, montre comment une carrière de gravier peut, avec les années, devenir un sommet de 87,6 mètres de haut: il suffit d’accumuler assez de gravats. En 2009, elle a été déclarée zone de protection du paysage. Quelques mètres sous la croix sommitale se trouve l’observatoire Bruno H. Bürgel, qui possède le télescope à miroir le plus puissant de Berlin. Il permet sans doute même d’apercevoir les vrais sommets montagneux au loin.

Avant de partir, l’idée d’aller randonner dans la capitale allemande me faisait un peu sourire, mais aujourd’hui je constate avec plaisir que la ville compte d’innombrables itinéraires de randonnée (et de vélo), 30 % de sa surface étant recouverte d’espaces verts et forestiers. Depuis 2019, il existe même un circuit de 150 kilomètres autour de Berlin. Pour en parcourir une étape, je reprends le S-Bahn pour Waidmannslust, au nord de la ville. Après quelques centaines de mètres, j’arrive au Tegeler Fliess, une zone de détente de proximité appréciée des Berlinoises et Berlinois. Je traverse des bois clairsemés et des marais de toute beauté, longe le lac de Hermsdorf puis arrive à Eichwerder Steg. En VTT, en skate ou à pied, de nombreuses personnes empruntent ce chemin qui, au début, est encore entouré de jolies villas urbaines, mais ne tarde pas à mener en pleine nature. 

J’aurais bien gravi plus de sommets berlinois. Car le guide, avec ses 57 propositions de randonnées, raconte de nombreuses histoires sur la ville et fournit des conseils pratiques sur les accès et les restaurants, ainsi que sur la manière de ralentir encore un peu le rythme. Il faut prendre son temps lorsqu’on marche, souligne Wilfried Griebel. Et garder quand même les distances à l’esprit, car la ville est vaste. Gageons que les montagnes de Berlin ne disparaîtront pas de sitôt. Et même que certaines d’entre elles continueront à pousser. Ici, rien n’est impossible.

Escursione a Berlino Teufelsberg
Silvia Schaub
La centrale d’écoute du Teufelsberg est considérée comme la plus grande galerie de street art d’Europe.
Informations

Accès: en train de nuit direct entre Zurich et Berlin, www.sbb.ch

Sur place: la Berlin WelcomeCard ABC permet de découvrir les environs de Berlin en transports publics, www.berlin-welcomecard.de

Bibliographie: «Bergführer Berlin, ein Stadtführer für urbane Gipfelstürmer», Wilfried Griebel et al., BeBra Verlag, env. 25 francs; «Bergführer Potsdam, die schönsten Spaziergänge zu den 75 Gipfeln der Stadt», Wolfgang Mörtl, BeBra Verlag, env. 28 francs; «WildBerlin, 50 grüne Sehnsuchtsorte in der Hauptstadt», Gary Schunack, BeBra Verlag, env. 25 francs.

Visites guidées: station d’écoute du Teufelsberg, www.teufelsberg-berlin.de

Informations générales: www.visitberlin.de, www.dav-berlin, www.alpenvereinaktiv.com

Ce voyage a été partiellement soutenu par Visit Berlin.